Menu
Suivez-nous
Facebook
Twitter
Le Vigneron du Val de Loire
L'information viticole pour les professionnels

Les secondes morsures du gel


Rédigé le Vendredi 28 Avril 2017

Il n'aura épargné personne. En deux vagues, le gel a touché tout le vignoble du Val de Loire. A des degrés divers : de 10 % par endroit, qui peut-être ne paraîtront pas sur le volume final, à des 100 %. Bilan par vignoble.


Pays Nantais : Deux épisodes de gel successifs ont frappé le vignoble nantais mercredi 26 et jeudi 27. S'il est encore trop tôt pour faire une estimation précise des dégâts, un tour dans les vignes suffit à comprendre qu'ils seront tout aussi importants, voire plus que l'an passé. « Le vignoble a été plus sévèrement touché qu'en 2016 », indique la Fédération des Vins de Nantes qui a lancé une enquête auprès des vignerons pour évaluer l'impact de la vague de froid. Le Sèvre et Maine a été particulièrement touché. « Assez durement » ,estime même Vincent Lieubeau de Chateau-Thébaud. « C'est assez significatif, nettement supérieur en tout cas à l'année dernière. » A Monnières, le Domaine de la Cordouère a fait le bilan : « 75 % des parcelles sont touchées, même celles situées en haut des buttes. »
En Muscadet Côtes de Grandlieu, Nicolas Choblet, vigneron à Bouaye estime ses pertes à « 30 %. Ce ne sont pas les mêmes parcelles que l'an dernier qui ont gelé. C'est sans doute lié au mode de culture. L'année dernière nous avions commencé le travail du sol plus tôt. Dans l'ensemble le secteur de Grandlieu a moins gelé qu'en Sèvre-et-Maine, même si du côté de Pont-Saint-Martin, on est autour de 80 %. Au sud du lac de Grandlieu, ça n'a pas gelé mercredi matin par exemple mais jeudi il faisait plus froid. »
En Muscadet Coteaux de la Loire, les dégâts sont « très variables » selon Carmen Suteau, présidente de la section. « A Anetz, 90 % des parcelles sont touchées, à Liré, c'est 30 % » annonce la présidente du bureau du conseil territorial de l'antenne Chambre d'agriculture de Clisson. « Selon les éléments récupérés par les techniciens de la Chambre, 70 % des surfaces du vignoble seraient impactées. Mais il est encore trop tôt pour faire un état des lieux précis. » La Chambre d'agriculture a d'ores et déjà alerté la Direction Départementale des Territoires pour mettre en place des mesures d'urgence en faveur de la viticulture.

Fiefs Vendéens : Le vignoble vendéen a semble t-il été un peu plus épargné par le froid. « Il y a eu un peu de dégâts ici et là. A Chantonnay notamment mais aussi à Brem », indique Frantz Mercier, président du syndicat. A l'Ile d'Olonne, le Domaine Saint-Nicolas fait savoir qu'il « a été touché, comme beaucoup, mais l'évaluation des dégâts est en cours. Il a gelé à nouveau dans la nuit de jeudi à vendredi il est donc encore trop tôt pour donner des chiffres. »


 Anjou-Saumur : L’effet du rasoir à deux lames. La première vague de froid – les 20 et 21 avril – avait déjà saisi un certain nombre de jeunes pousses dans le vignoble d’Anjou-Saumur, en particulier dans l’Aubance, et le Saumur Champigny, la Vienne saumuroise et les Deux-Sèvres. Mais la seconde – les 26 et 27 avril – a été particulièrement tranchante. A Savennières, par exemple, on estime les dégâts entre 80 et 100 %. Pour certains, la vendange 2017 est faite…
Dans le Layon, le préjudice est divers. Le gel n’a pas été très équitable. Quelques communes (Faye d’Anjou, Champ-sur-Layon…) ont été plutôt épargnées ; d’autres ont été plus impactées (Saint-Lambert du Lattay, Rochefort-sur-Loire). Dans le Haut-Layon, le coup de froid a été disparate : des parcelles sont grillées à 50 % ; d’autres à peine à 10 %.
Enfin, dans le Saumurois, c’est le secteur de Saumur Champigny qui a le plus souffert : la zone Parnay-Turquant notamment, et celle de Saint-Cyr en Bourg à Chacé, avce des parcelles bien endommagées. D’autant que certaines ont subi les deux attaques successives.
Pourtant, les vignerons se sont donnés du mal. Des bougies ont été allumées ici ou là. Des round-ballers de paille ont brûlé du côté de Brissac, également dans le Saumurois, où six exploitations de Montreuil-Bellay par exemple se sont mobilisées pour protéger ensemble un ilot de 50 ha.
Au final, difficile de dresser un état des lieux sur l’ensemble du vignoble. Pour cela, la Fédération viticole de l’Anjou a lancé une enquête. Une chose est sûre, le gel laissera des traces dans les exploitations les plus touchées, en particulier celles qui l’avaient déjà pris de plein fouet en 2016.
 

Touraine : Le gel à nouveau brûlé des bourgeons aux petits matins des 26, 27, 28 avril, ainsi que le 29 avril alors que les prévisions météo ne l'avaient pas annoncé. Des gelées avec des conditions plus humides, marquées parfois par des averses de grésil la veille. Les vignerons ont utilisé tous les moyens possibles pour lutter : tours anti-gel, bougies, aspersion, feux de paille, et hélicoptères.

A Montlouis, huit hélicoptères ont de nouveau survolé les vignes, sur près de 300 ha les 27 et 28 avril. « Ils ont donné de très bons résultats la semaine dernière, mais lors de ces nouvelles gelées où l’humidité était plus élevée, les zones survolées ont présenté plus de dégâts. Un vol de nuit aurait été nécessaire. Grâce à l’intervention de notre députée Claude Greff, deux hélicoptères ont cependant pu décoller une demi-heure plus tôt, avant 6 h », explique François Chidaine, vice-président de l’ODG. Dans les  zones non équipées de  tours anti-gel mobiles ou de frost-guards et non survolées par hélicopère, les vignes ont localement souffert, avec parfois 80% de bourgeons grillés. De multiples feux de paille ont été allumés. Samedi dernier, 29 avril, les températures ont été à nouveau négatives, contrairement aux prévisions de Météo-France, qui avaient conduit les vignerons à ne pas réserver d'hélicoptères. A ce jour, Emeline Hascoët, directrice de la coopérative, estime les pertes à "35/40%, avec pour certains apporteurs des vignes touchées à plus de 80%". Damien Délecheneau, président de l'ODG, chiffre les dégâts sur le vignoble de l'appellation à 40%.

A Chinon, le gel a, à nouveau, sévi en fin de semaine dernière. Des vignes dans le Véron et à Panzoult ont été impactées, mais les dégâts ont surtout concerné l'est de l'appellation, notamment à Crouzilles et Avon-Les-Roches. "Des parcelles y ont gelé  à 80 voire 90%. Elles étaient pour la plupart non équipées en moyens de protection anti-gel, constate Francis Jourdan, président de l'ODG. A ce jour, les gels de deux dernières semaines ont touché entre 25 et 30% du vignoble de l'AOC". Pour la première fois, des hélicoptères ont été loués, dans un secteur du Véron et au château de La Grille (Baudry-Dutour). Des feux de paille ont également enfumé le vignoble.

A Bourgueil, Philippe Boucard président de l'ODG estime à ce jour que les gels ont fait "25% de dégâts sur le vignoble de l'AOC, avec des situations catastrophiques pour des vignerons déjà très touchés en 2016 et qui ont eu plus de 80% de bourgeons gelés cette année". Des hélicoptères ont été appelés à la rescousse. Plusieurs dizaines de vignerons ont décidé de louer cinq hélicos pour cinq îlots de 30 ha chacun. « Mais ces zones ont quand même eu des dégâts. Il y faisait moins 3°C à 2 h du matin. Des bourgeons avaient déjà gelé lorsque les hélicos ont pu décoller, en toute fin de nuit », relate Philippe Boucard, président de l’ODG.  Des vignerons ont aussi allumé des feux de paille.  Souvent sans guère d’illusions, certains parlant d’un « effet placebo », d’une action faite avec « l’énergie du désespoir ». Certains n'avaient pas plié les baguettes de leurs vignes et en ont vu l'effet bénéfique contre le gel. Un phénomène également constaté par la chambre d'agriculture d'Indre-et-Loire. Des pulvérisations préventives de PEL101GV ou de Greenstim n'ont eu en revanche aucune efficacité.
A Saint-Nicolas-de-Bourgueil, "le gel a atteint environ 30 hectares sur 1100, des vignes atteintes entre 15 et 20% en moyenne", signale Alexandra Genneteau, animatrice du syndicat des vins. Certaines vignes ont été touchées jusqu'à 80%. Dans l'AOC, l'aspersion concerne cette année plusieurs dizaines d'ha supplémentaires, avec une autorisation provisoire pour plusieurs réserves d'eau et un prélèvement dans l'étang des Ténières.

En AOC Vouvray, « les gels ont provoqué à ce jour 15% de pertes sur l'appellation, avec des dégâts localisés, indique Arnaud Tabary-Devisme, directeur de l’ODG. Des vignerons ont eu recours à un hélicoptère sur la vallée de Cousse le 27 avril ». Le 20 avril, des vignerons avaient fait intervenir un hélico sur Chançay.

En Touraine-Amboise, le sud du vignoble a cette fois été épargné, mais le gel a touché plusieurs hectares de vignes vers Saint-Ouen et à Limeray. Des centaines de feux de paille ont été allumés, avec l'aide d'agriculteurs, pour faire remonter la température et produire des écrans de fumée destinés à préserver les bourgeons des rayons du soleil levant.
En Touraine-Azay-le-Rideau, des vignerons ont subi de nouveaux dégâts, notamment le 29 avril. Le Touraine Noble-Joué n'a pas non plus été épargné. "Nous estimons les dégâts à environ 45% - 50%. 8 ha ont été protégés par des bougies, dont l'efficacité a été nulle en bordure de champ, et nous avons fait brûler environ 50 grosses bottes carrées de paille", explique Rémi Cosson, président des vignerons.

Sur l'ensemble de l'Indre-et-Loire, "les dégâts ont impacté entre 15 et 20% du potentiel de production", estimait le 28 avril François Chidaine, président de la FAV 37. Une réunion avec les services de l'Etat est prévue prochainement. L'administration a déjà signalé que les vignerons touchés pourront demander des mesures de chômage partiel, un dégrèvement de la TFNB et un report des cotisations sociales.

Dans le Loir-et-Cher, le gel a sévi en Touraine-Mesland, vallée du Cher, et vers Saint-Romain, Oisly, Choussy, Angé, Couffy, Meusnes etc., avec des parcelles atteintes jusqu'à 100%....Le thermomètre est descendu jusqu'à moins 5°C. "Les dégâts sont plus importants que l'année passée, les gels ont été localisés mais fortement impactants", déclare Alain Godeau, président de l'ODG Touraine. "Les tours éoliennes complétées de grosses bougies ont bien fonctionné, les petites bougies (250 à l'ha) aussi. Les feux de paille ont eu un effet dans les zones où le gel n'était pas fort", indique Dominique Girault, président de la FAV 41. 

A Cheverny-Cour-Cheverny, le gel a à nouveau frappé. « Nous avons eu pas mal de dégâts, qui ont concerné plus de vignes que les 20 et 21 avril. Des parcelles ont été atteintes à 100%, constate Michel Gendrier, président de l’ODG. Certaines tours éoliennes n’ont pas eu une efficacité totale et dans mes vignes protégées par aspersion, j’ai eu quelques pertes dans les bordures à cause du vent ». 
Dans les Coteaux du Vendômois, les dommages sont importants, annonce Nicolas Parmentier, animateur de l'ODG : "les deux vagues de gels cumulées ont fait aux alentours de 40% de dégâts dans l'appellation".
Une réunion s'est tenue le 2 mai à la chambre d'agriculture à Blois avec la FAV 41, les ODG, la MSA, les centres de gestion, des assureurs, des banques. "Nous préparons des mesures de soutien pour les vignerons en difficultés  : reconnaissance des communes sinistrées, exonérations de cotisations MSA, de TFNB, activation du Fonds d'allègements des charges, chômage partiel pour le salariés etc. Une visite de vignes avec le préfet et les élus est prévue. Dans l'immédiat, il est difficile d'estimer les pertes de récoltes", poursuit Dominique Girault. Le député du Loir-et-Cher Patrice Martin-Lalande a posé le 5 mai une question écrite au ministre de l'Agriculture sur la nécessité de mesures de soutien à court et à moyen terme, comme la "généralisation du VCI, la défiscalisation des stocks et un encouragement fiscal à la création de réseaux collectifs de lutte anti-gel".

Dans les AOC Jasnières Coteaux du Loir, le gel a sévi dans quelques parcelles, en particulier dans les jeunes vignes. Dans l'appellation Valençay, les dégâts sont plus prononcés avec, selon Francis Jourdain, président de l'ODG, entre 30 et 50% de vignes touchées.

Adeline Le Gal
Ingrid Proust
Patrick Touchais 





Dans la même rubrique :
< >

Lundi 11 Mars 2024 - 09:20 La greffe d’Orchidées n’a pas pris